Le
18 juin 2009 :
(13:00
Unità Naziunale,
www.unita-naziunale.org - Corse - Lutte internationale)
Vous imaginez la photo ? Sarkozy, à peine
revenu des obsèques chahutées d’Omar Bongo, d’un congrès de
Versailles boycotté ; le voilà qui serre la main d’Elie Domota ! La
photo du siècle. La presse française aux anges… Eh bien, non ! Ce ne
sera pas pour cette fois, Monsieur le Président de la
France-et-des-dernières-colonies-françaises-des Caraïbes. Le LKP,
qui depuis janvier 2009, dénonce les faits et les méfaits de la
politique coloniale en Guadeloupe, entretient un lourd contentieux
avec l’État Français.
Les 44 jours de mobilisation n’ont pas suffi pour
faire cesser les pwofitasyon. En réalité, le LKP a simplement permis
de focaliser l’attention des larges masses populaires sur une
situation qui perdurait depuis si longtemps qu’elle était devenue
comme «normale». Au fil des années, les prix flambaient,
les profiteurs s’enrichissaient et, hormis les organisations
syndicales combatives et quelques groupes politiques
anticolonialistes et plutôt exsangues, à force de n’être pas
audibles, il ne se passait plus grand chose. Le colonialisme ou,
pour faire moderne, le post-colonialisme, était, à des degrés
divers, accepté. Les grandes luttes des années 70, menées après la
création des syndicats paysans (UTA, UPG, UGTG), étaient déjà
presque totalement oubliées.
Les années de feu ? Quasiment jetées aux orties. Et pourtant, au
mitan des années 80, le Groupe Guadeloupéen de Libération Armée (GLA),
organisation armée et clandestine, revendiqua quelques dizaines «d’attentats»
sur tout le territoire de la Guadeloupe et même à Paris. Qui se
souvient encore que ce GLA avait lancé un ultimatum aux Français
résidents, leur ordonnant de quitter la Guadeloupe avant le 31
décembre 1980 ? C’est loin…
Trois années plus tard pourtant, une autre organisation clandestine
politico-militaire appelée «Alliance Révolutionnaire Caraïbe»
(ARC), se signalait dans les dernières colonies, par une vigoureuse
campagne d’attentats, dont ceux de la Préfecture de Basse-Terre, de
nombreux dégâts et blessés, la destruction totale des studios de
Radio Caraïbe Internationale (RCI), des hôtels, des bâtiments
publics. 30 ans après, tout cela était comme oublié. Même les
émeutes de mai 67 et le lourd bilan humain s’enfouissaient dans les
profondeurs du temps de l’oubli. Guadeloupe et Guadeloupéens, comme
assoupis, anesthésiés, alzeimerisés, sous la torpeur coloniale.
Certains disaient même que les Guadeloupéens étaient dans une
postures de zombis..
LKP a donc réveillé les morts-vivants, avec des mots vivants :
Pwofitasyon, Gwadloup sé tan nou, Gwadloupéyen doubout,
wouvè zyé a zòt. Les mots ont eu leur effet thérapeutique.
Le pays qui, des années depuis, désespérait les plus optimistes,
comme un poing fermé, s’est dressé à la face des profiteurs. La
Guadeloupe de la guerre anti-esclavagiste de mai 1802, de
l’insurrection d’octobre 1801, la Guadeloupe, qui a exporté sa
révolution, avortée en Haïti, s’est subitement réveillée. LKP aura
été le détonateur.
100 jours après, oui il y a eu quelques avancées: des foyers de
luttes syndicales s’allument ici ou là, des accords sont signés,
près de 50 000 travailleurs ont bénéficié des 200 euros. Oui, mais
la course effrénée des caddies a repris, petit à petit dans les
hypermarchés du groupe Hayot. Le marché intérieur ne s’est pas
encore développé. On ne change pas profondément un pays si atteint
de consumérisme aigu en 44 jours. Le combat du LKP, tout héroïque et
exemplaire qu’il fut, n’est pas une «révolution». C’est sans aucun
doute le début de quelque chose. Chacun le perçoit. Le peuple
guadeloupéen, le syndicat, les hommes politiques, surtout eux.
On aura beau tourner et virer dans tous les sens, LKP est condamné à
continuer. Rares sont ceux qui, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur,
ne le disent pas Mais il est bien de parler, de disserter, de
langanner, mais quand on a une responsabilité historique aussi
énorme, il faut éviter de se tromper. Le LKP n’a pas droit à
l’erreur, on voudrait que ce soit ça la réalité. Mais aucune avancée
notable ne se fait sans aucun mouvement social, sans une marge
d’erreur. Ni Domota, ni Nomertin, ne sont des dieux. LKP peut se
planter, faire de mauvais choix, sous-estimer tel facteur, négliger
un aspect. Il faut qu’on le sache, ces hommes et ces femmes,
militants, qui se donnent avec autant d’énergie pour leur pays, pour
leur peuple, restent de simples humains.
Ils n’ont aucune science infuse. Il ne faut pas que les
Guadeloupéens deviennent des néo assistés du LKPisme. LKP n’a pas de
solution toute faite, un modèle expérimenté hors de nos murs et
qu’il suffirait de copier-coller. Qu’on se le dise, nous devons TOUT
inventer et chaque jour. Le refus d’aller serrer la main de Sarkozy,
de se rendre au Congrès le 24 juin, ou de participer aux États
Généraux sont des actes éminemment politiques. Ils sont la
traduction d’un choix. Globalement, le peuple guadeloupéen entend,
comprend, accepte. Mais outre la baisse des prix, il attend déjà
autre chose de LKP. Des choix politiques ? Nous sommes à quelques
longueurs des Régionales, LKP et surtout les organisations
politiques qui hibernent en son sein, se doivent de se réveiller, de
trouver une voie originale et de donner le tempo. A chacun sa part.
Jégo disait, en début de semaine, la Guadeloupe est aujourd’hui
calme. Sarkozy peut enfin venir… C’est vrai ça ?
Source photo :
caribcreole1, Unità Naziunale, Archives du site.
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